Partage d’une expérience
Je vis dans un pays, dans une Europe de liberté.
Je suis libre de mes mouvements et déplacements.
Je suis libre de me nourrir comme je l’entends (c’est déjà moins vrai pour des personnes à faibles revenus)
Je suis libre d’exprimer mes pensées (encore que… censure sur les réseaux et exclusion de journalistes sont de plus en plus fréquentes.)
Enfin moi, je me sens un homme libre.
D’autant plus libre lorsque je suis au sommet de l’une de ces montagnes de l’Algarve où le soleil radieux dans un ciel d’un bleu limpide, m’illumine.
Je suis libre dans cette nature qui m’enveloppe de sa verdure et des premières fleurs ; alors que les papillons volètent autour de moi et que la mésange chante les louanges de cette beauté.

Je suis bien libre de fredonner, de crier et de rire dans cet eldorado de douceur et de calme.
Ne serait-ce pas le paradis ?
Et pourtant…
Je viens de perdre toute ma liberté !
La splendeur du pays de cocagne s’évapore, le ciel se couvre.
La lourdeur pèse dans mon cœur, mon corps ne répond plus.
- Une contracture musculaire au mollet m’empêche d’avancer.
Cependant, je n’ai qu’une envie, croquer la vie à pleine dent !
L’énervement et la rage s’emparent de moi, mais c’est inutile sans être délicat, la douleur me cloue sur place.
Et j’entends :
- As-tu oublié ton âge ?
- Tu n’as plus 20 ans, tu en fais toujours trop.
- Cela devait arriver.
J’en passe et des meilleurs. Et déjà, certains se gargarisent dans leurs arguments heureux de voir la bête à terre.
Donc serait-ce logique ?
Je ne vais pas me contenter de ces réflexions basiques et vulgarisées.
Mais alors que faire ?
Je reste certain que l’exercice physique est la clef de la santé, de la paix de l’esprit et ce, quel que soit l’âge. Il est important de pousser son corps. Je ne recherche pas la compétition, je veux maintenir un corps et un esprit dynamique, souple et actif.
Ma conviction me conduit à essayer de comprendre ce qu’exprime mon organisme et pourquoi il réagit aussi violemment. Probablement que je gère mal une situation qui provoque en moi des sentiments que je renie, car ils me dérangent.
Voici l’histoire, probable auteur de ce désagrément.
Avec Laetitia, nous avons un appartement dont nous décidons de nous défaire. L’agent immobilier à qui nous confions la vente trouve rapidement acquéreur et ce dernier signe le compromis, tout s’arrange facilement.
La finalisation s’effectuera au terme du bail du locataire, ce jour arrive et patatras les embûches se succèdent.
Je n’y crois pas et j’en tombe de haut à tel point que lors de l’un de mes footings je me prends un gadin digne des plus grands cascadeurs.
Des sentiments sombres émergent : l’énervement, la colère, l’angoisse, occupent ma tête et tout se bouscule ; avec le retour d’histoires du passé désagréables qui remontent comme les effluves nauséabondes d’une eau stagnante que l’on remue.
Comme je suis statufié, je n’ai qu’une chose à faire, réfléchir, comprendre le pourquoi et le comment de ce qui m’arrive.
Prise de conscience ou illumination, peu importe.
Je réalise que dans cette société de liberté où je vis et qui est enviée par tant de citoyens d’autres pays ; je ne suis pas libre du tout !
Je suis complètement prisonnier de mes pensées qui m’angoissent, me rendent déplaisant avec mon entourage et me privent de mes activités préférées.
Je suis prisonnier de moi-même !
J’ai lu un certain nombre d’écrits sur les camps d’extermination de la dernière guerre mondiale, j’en ai visité deux, dont Buchenwald. Voilà le témoignage de certains de ces prisonniers « je suis toujours resté libre au fond de moi », «Mes tortionnaires n’ont jamais pu m’enlever ma liberté intérieure, mes principes, mon éthique, la poésie et c’est cela qui m’a permis de survivre».
J’avais du mal à comprendre et j’étais interloqué par ces propos après avoir vu leurs conditions de détention.
Nelson Mandela, dont la vie m’a passionné, émettait une opinion semblable. Alors qu’il croupissait en prison depuis quelques années, il disait :
« je suis un homme libre, car je respecte mes convictions».
Et à ses amis de l’ANC, incarcérés avec lui et qui vouent une haine envers ce gouvernement de l’apartheid, il formule :
« Nous avons un devoir, c’est de ne pas nous comporter comme eux !»
Ce que je vis me permet de saisir le sens de cette liberté dont il parle.
Dans ces instants, je m’emprisonne par mes pensées, le gardien de ma cellule étant le mental. Il s’occupe d’alimenter la peur, le doute et m’abreuve de supputations invraisemblables.
Je viens de créer des barreaux entre moi et ce paysage idyllique qui se déroule devant mon regard. Je n’arrive plus, je ne peux plus profiter, me voici hanté, derrière chaque arbre se cache un être maléfique.
Pourquoi un problème qui n’en est pas un, car avec le temps il va se résoudre ; peut-il provoquer un tel désarroi ?
Ai-je perdu la santé ? Ai-je perdu mon amour ? Ai-je perdu mes biens, etc. ?
Ces pensées négatives et inutiles se bousculent. Chacune tente d’avoir l’écho le plus puissant, peut-être se servent elles d’un mégaphone ? En tout cas elles me font gaspiller de précieux instants de vie qui s’égrainent sur ma grande horloge biologique.
Les idées sombres se succèdent, les sentiments maussades font vibrer mon diapason intérieur et le corps est blessé, que faire ?
Avant tout, je vais me calmer, me poser, accepter et avoir l’humilité de reconnaître mes faiblesses, mes peurs. Je sais que ce chemin est celui de la guérison.
Je me souviens d’un médecin qui disait à mon épouse qui avait le cancer » vous avez le droit d’avoir peur, vous avez le droit de pleurer, mais vous n’avez pas le droit de vous complaire dans cet état ! »
La compréhension intellectuelle est une première brèche dans ce mur de grisaille avec l’arrivée d’air frais qui s’introduit dans le mental en fusion tel le magma volcanique.
La relaxation, la respiration méditative apaisent et comme la jambe refuse d’avancer le moment est peut-être venu de m’occuper un peu plus de moi. Puis il ne faut pas craindre de demander de l’aide. Cela implique parfois de mettre sa fierté au fond de la poche et de s’adresser à la compagne ou le compagnon qui nous accompagne sur ce chemin de l’existence. N’est-ce pas elle ou lui le mieux placé ?
Pour moi oui, car on me dit que j’ai une fée à mes côtés, ce que je crois aisément !

Puis partir en quête de la personne qui va être capable de refaire circuler l’énergie de vie qui s’est bloquée. Il serait facile de s’abandonner aux méthodes qui dissèquent le corps et se limitent au seul problème mécanique. Parfois, on peut en avoir besoin comme cela m’est arrivé lors de mon accident de tracteur, car j’ai eu des fractures.
L’être humain est une globalité alors je vais rechercher dans les thérapies de la médecine chinoise.
Enfin, lors de la lecture d’un livre sur les grandes maladies, une phrase résonne tout de suite en moi :
« Mon corps me dit que je peux faire confiance à l’avenir et que la vie s’occupe de moi » .
Certains en riront, peu importe, je réalise que j’ai perdu cette confiance en moi, en la vie qui depuis 69 ans est fréquemment intervenue au moment opportun. Il y eut des périodes où je me voyais sombrer et j’étais prêt à me noyer, alors une circonstance libératrice arrivait. Comment ? Pourquoi ? Je n’ai pas de réponses, l’essentiel est d’accepter la simplicité et remercier.
Dans ce temps de repos qui m’est imposé par mon corps, je comprends aussi que je dois forger ma patience pour la rendre robuste face aux attaques sournoises des évènements.
Trop souvent, j’aimerais que décisions et actions soient plus prompt que la vitesse de la lumière et me voici lambinant comme l’escargot. Je dois réapprendre, moi le passionné de la nature que dans ce milieu tout évolue, grandit avec lenteur et atteint la perfection.
Je tenais à vous partager cette expérience, car rapidement même avec la connaissance, l’ego, le mental nous remet dans la prison du marasme des idées pernicieuses de la supposition.
Il y la liberté de mouvements,
La liberté d’expression et intellectuelle,
La liberté de bénéficier d’une culture… qui sont merveilleuses et dont tant d’Humains sont privés.
La liberté de l’âme ; ne serait-ce pas celle dont on ne parle que peu?
Et pourtant, nous en sommes les gardiens. Ne serait-ce pas cette liberté qui transforme notre existence en un passage sombre ou alors en un chemin enchanteur où seule la joie nous guide?
N’y a-t-il pas dans notre environnement profusion d’idées qui nous emporte dans la spirale de la déprime ou dans celle de la colère et des disputes ?
Telle que des idées politiques ou religieuses, des principes inculqués dans notre enfance ou des croyances populaires.
Cela pose la question ; qui sommes nous et que voulons nous dans cette vie ?
Pierre Perret chantait ouvrez la cage aux oiseaux. Moi depuis le canapé de ma caravane en Algarve j’entonne :
Ouvrez la cage de vos pensées négatives, retrouvez votre liberté source de joie de vivre.
Je me réfère à la sagesse d’Aristote :
« nous sommes ce que nous répétons sans cesse »
Citation confirmée par Marc Aurèle :
« Le bonheur de votre vie dépend de la qualité de vos pensées » .
Et si maintenant chaque matin au réveil je décidais de dire :
» Quotidiennement, je formule des pensées positives et ce sont les seules que je génère ».
Mais alors la liberté ; est-ce pouvoir se déplacer comme on l’entend ?
Ou serait-ce plutôt un esprit indépendant qui me sort de tout principe, de toute obligation ? Ce qui me permet alors d’être serein avec un corps détendu et une joie de vivre.
Cela doit être un mariage des deux !
N’êtes-vous pas parfois surpris par la joie de vivre d’un handicapé dont les mouvements sont limités ?
Cette liberté de déplacement très agréable ; ne serait-elle pas une liberté virtuelle tant que notre mental nous garde prisonniers ?
» La véritable liberté exige de s’affranchir de la dictature de l’ego et de son cortège d’émotions. »
Matthieu Ricard
Merci beaucoup. Dans tous ces partages que je fais mon plus grand bonheur c’est de savoir que j’apporte en toute humilité un peu d’étoiles dans les yeux des autres.
Merci
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Nous te souhaitons de continuer ton chemin et de trouver où recevoir le bonheur que tu sauras penser…Merci pour la confiance que tu nous transmets.
Bon courage et… bonne année!!
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